« Georges Albertini fut le bras-droit de Marcel Déat
au Rassemblement National Populaire et pour cela,
condamné en 1944 lors de l’Épuration…
Il n’en fut pas moins le conseiller occulte
de deux Présidents français :
Georges Pompidou… et Jacques Chirac ! »
Entretien avec Philippe Randa à propos de
Des Rescapés de l’Épuration : Marcel Déat et Georges Albertini co-écrit avec Roland Gaucher
(propos recueillis par Aliénor Marquet)
A–t-on une idée exacte de ce qu’a été l’épuration en France de 1944-1945 ?Le phénomène de l’Épuration s’est déroulé dans les mois et les années qui ont suivi la fin de la guerre en France. Elle a donné lieu à des condamnations très lourdes, et surtout à de très nombreuses condamnations à mort. Elle a également été à l’origine dans certaines régions de règlements de compte, dûs notamment à des bandes communistes. Le nombre de victimes, dans ce cas, reste souvent sujet à caution.
Après la période plus calme qui suivit et fut marquée par des mesures d’amnistie, l’Épuration devait reprendre des décennies plus tard à l’égard de quelques personnalités comme Paul Touvier – condamné à la prison à vie et mort durant sa détention – Maurice Papon – condamné à dix ans de réclusion toujours en détention à ce jour – ou René Bousquet – assassiné à son domicile par un « justicier »… Bien que fort tardive, ces épurations successives ont été accompagnées d’une importante mise en scène médiatique.
Face à cette épreuve, les rescapés de « l’aventure hitlérienne » forment une double catégorie…Il y a ceux qui échappèrent à la répression en prenant la fuite. Le cas le plus célèbre, largement abordé dans la première partie de notre livre, est celui du couple Déat qui, via Gênes, trouva finalement refuge dans un couvent de Turin.
Bien d’autres personnalités de la Collaboration réussirent à se réfugier dans divers pays européens, mais surtout en Amérique du Sud et au Moyen-Orient.
D’autres encore parvinrent à échapper à l’Épuration en se camouflant en France sous une fausse identité et en vivant alors dans la clandestinité. Ce fut le cas du milicien Paul Touvier.
Il y eut ceux, encore, qui bénéficièrent de protections…Ils échappèrent à l’arrestation, voire aux poursuites judiciaires, en raison de certaines indulgences ou en bénéficiant, pour des raisons diverses, de la clémence des juges. Certains d’entre eux furent ainsi des « demi-rescapés ».
Ce fut le cas de Georges Albertini, de Pierre Bousquet ou de Maurice Papon. Albertini devait même retrouver une influence politique certaine après sa sortie de prison. À une condition toutefois : qu’on ne parle pas de lui !
Bousquet et Papon – ce dernier surtout – jouèrent un rôle important dans la politique française ou dans le monde des affaires. Le jour vint, pourtant, où l’on s’avisa de leur demander des comptes.
Ce sont ces diverses situations que nous avons entrepris d’aborder dans ces « rescapés de l’Épuration ». Sans prétendre, bien entendu, être exhaustif.
Le destin de Georges Albertini ne fut-il pas des plus étonnant ?Georges Albertini fut le bras-droit de Marcel Déat au Rassemblement National Populaire et pour cela, condamné en 1944 lors de l’Épuration. Homme de l’ombre, il gravit les marches du Pouvoir jusqu’à occuper un bureau à l’Élysée : cette destinée hors du commun ne fut possible que par les importants réseaux qu’il tissa méthodiquement. Les noms les plus illustres ou les plus sulfureux de la IVe et Ve République jalonnent son itinéraire : de Boris Souvarine (proche de Lénine) à Marie-France Garaud et Pierre Juillet (éminences grises gaullistes), du banquier Hippolyte Worms aux collaborateurs Henri Barbé et Pierre Célor, de l’historien révisionniste François Duprat au président de l’Assemblée Edgar Faure, du ministre Alain Madelin au catholique traditionaliste Jean Madiran et au chroniqueur du Monde Gilbert Comte, ils sont innombrables ; citons encore Jacques Baumel, Jean Baylot, Guy Lemonnier, André Malraux, Guy Mollet, Xavier Raufer, Nicolas tandler, Mgr Tisserant, Louis Vallon, etc. Et aussi deux présidents de la Ve République dont il fut le conseiller occulte : Georges Pompidou… et Jacques Chirac !
Des Rescapés de l’Épuration : Marcel Déat et Georges Albertini, par Roland Gaucher et Philippe Randa, éditions Dualpha, collection « Vérités pour l’Histoire », 566 pages, 45 euros. Très nombreuses illustrations + index.