Réforme des collèges ou l'art de tomber de Carybde en Scylla ! A force de remettre en cause les fondements constitutifs de son histoire et de sa culture, sa classe dirigeante a, bien sûr, toujours de quoi argumenter pour justifier ses choix.
Ainsi trouve-t-on sans doute stimulant pour les générations à venir de les épargner de l'enseignement du latin et du grec.
Il est vrai que promouvoir l'art de l'improvisation de Jamel Debbouze comme y songe Manuel Valls, contribuera certainement mieux au rayonnement culturel de la France.
Les réactions ne manquent pas, suite à cette idée du Premier Ministre français.
http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2015/04/22/31003-20150...
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A LA UNE DE CHALLENGES
Publié le 27-04-2015 à 15h
Vallaud-Belkacem se trompe
Par Denis Jeambar
"Un abîme de perplexité", tel est ce que l'on ressent lorsqu'il s'agit d'analyser les propositions du Conseil supérieur des programmes pour mettre un terme au lent déclin du collège en France. « Mieux apprendre pour mieux réussir. » On ne pouvait espérer meilleur mot d'ordre pour la réforme des collèges voulue par Najat Vallaud-Belkacem, la ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. On applaudit même quand elle fait de la maîtrise de la langue française et des savoirs fondamentaux une priorité absolue. Enfin, se dit-on, une réforme à la hauteur de cet enjeu majeur : mettre un terme au lent déclin du collège en France, constaté par toutes les évaluations internationales.
Ce projet, et les propositions du Conseil supérieur des programmes qui lui font écho, plongent, cependant, le lecteur dans un abîme de perplexité. La belle promesse républicaine d'égalité à l'école, avancée par la Ministre dans le préambule de sa réforme, est trahie par la forme même de ce texte. Mis à la disposition de tous par le ministère, sa lecture en est tout simplement réservée à une élite de pédagogues seuls capables de comprendre le langage qui y est employé. On ne doute pas que ces savants rédacteurs aient lu L'Art poétique de Nicolas Boileau. Une chose est sure, néanmoins, ils n'en n'ont pas retenu ces vers :
« Avant donc que d'écrire, apprenez à penser.
Selon que notre idée est plus ou moins obscure
L'expression la suit, ou moins nette, ou plus pure.
Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement,
Et les mots pour le dire arrivent aisément. »
Sans doute, les artisans de la refondation du collège et des programmes auront beau jeu de rétorquer que Boileau fut l'un des chefs de file des Anciens dans la querelle des Anciens et des Modernes qui déchira l'Académie française à la fin du XVIIe siècle. C'est vrai, mais trois siècles ont passé et cet « Ancien » est demeuré célèbre et, surtout, reste célébré pour la justesse de ses jugements. Preuve que les Modernes, dont nos refondateurs de collège, ne sont pas toujours ceux que l'on croit. On ne déniera pas aux pédagogues une réelle volonté d'améliorer les choses mais pourquoi tourner le dos au commun des citoyens, pour qui l'école est faite, et tenir des propos si obscurs ? La pédagogie est certes une science mais s'adressant à tous elle devrait être entendue de tous. Ainsi sommes-nous passés de la pédagogie au pédagogisme. Une maladie, il est vrai, qui nous vient de loin. Il suffit de lire Victor Hugo et les Contemplations :
« Philistins, magisters, je vous hais pédagogues,
Car, dans votre aplomb grave, infaillible, hébété,
Vous niez l'idéal, la grâce et la beauté !
Car vos textes, vos lois, vos règles sont fossiles!
Car, avec l'air profond, vous êtes imbécile.
Car vous enseignez tout et vous ignorez tout. »
Cuistre, vous-même, avec vos citations, me répliquera-t-on ! Peut-être mais ces auteurs-là, qui ont fait la richesse de cette langue française que la réforme prétend défendre, sont-ils compréhensibles ! Ils n'auraient jamais écrit « Aller de soi et de l'ici vers l'autre et l'ailleurs » pour évoquer les langues étrangères et régionales. Si la guerre est une chose trop grave pour la confier aux militaires, comme le disait Clemenceau, on finit par se demander si l'instruction n'est pas trop fondamentale pour la laisser aux pédagogues et à des « sachants » qui, sur le fond aussi, tranchent et décident de tout.
Par exemple de rendre obligatoire l'enseignement de l'histoire de l'Islam en 5ème et facultatif l'étude des empires byzantins et carolingiens, c'est-à-dire l'histoire du monde chrétien. Ou encore d'ignorer la pensée humaniste entre les XVème et XVIIème siècle, c'est-à-dire la Renaissance, pour ne s'intéresser qu'à « L'émergence du Roi absolu. ». Facultative également l'étude des Lumières ou de la Révolution américaine et du Nouveau monde. Pourquoi de tels choix ? Faute d'être des pédagogues nous-mêmes, nous ne le saurons jamais.
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A ne pas confondre *sachants* -alliés du pédagogisme* et vrais pédagogues dévoués qui choisissent avec soin un enseignement de qualité bénéfique pour leurs élèves! Ces mêmes pédagogues qui, actuellement, doivent hurler à la lecture du programme prévu dont un apercu est donné au dernier paragraphe!!!
Klary